DE (BONNES) NOUVELLES (ET DE MOINS BONNES) DE LA COALITION DU LEOPARD

On a appris cet après-midi que la Norvège allait fournir à l'Ukraine huit Leopard 2A4 ainsi qu'une contribution financière à la fourniture de pièces de rechange et de munitions pour les chars concernés. Les huit chars fournis par Oslo pourraient arriver en Ukraine à la fin du mois de mars, confirmant les engagements pris en janvier par le gouvernement norvégien. Cette concrétisation des engagements norvégiens intervient moins de deux semaines après l'annonce de la décision d'Oslo d'acquérir des Leopard 2A7, au nez et à la barbe du K2 pourtant donné vainqueur des évaluations menées l'hiver dernier. Le package norvégien comprend également quatre engins spécifiques qui pourraient être des poseurs de pont ou des des engins du génie, selon les besoins de l'Ukraine. En outre la Norvège devrait participer aux actions de formation des équipages ukrainiens actuellement en Pologne. 

Cette bonne nouvelle pour la coalition du Leopard a été communiquée quelques heures avant que l'Autriche ne fasse part de son refus de participer à la formation des équipages ukrainiens, évoquant la neutralité du pays pour justifier ce refus. L'actualité de la coalition du Leopard est également marquée par le scepticisme affiché par certains militaires ukrainiens face à l'arrivée de ces engins dans le conflit. Ces réserves émises par plusieurs membres des forces ukrainiennes portent sur les conditions d'acheminement des chars, la formation des équipages et surtout sur l'utilité relative de certains de ces engins sur le terrain. Concernant l'acheminement des char fournis ceux-ci devront transportés sur le territoire ukrainien dans des conditions de sécurité destinées à éviter leur repérage ainsi que d'éventuelles attaques russes. Les militaires ukrainiens soulignent également le risque que pourrait représenter une formation trop rapide des futurs équipages. Cette formation pourrait se révéler plus complexe que prévu si les équipages impliqués devaient être constitués de recrues ne possédant aucun pré-requis blindé, au lieu d'équipages confirmés. Cette hypothèse semble de plus en plus plausible en raison de la pression subie par l'armée ukrainienne, qui ne permettrait de "divertir" des équipages confirmés pour suivre ces formations. Enfin la récente annonce de la livraison prochaine de chars Leopard1 A5 ne devrait pas conférer un avantage technologique majeur pour l'armée ukrainienne qui se retrouverait dotée de chars n'offrant que peu d'avantages par rapport aux chars déjà utilisés par les unités blindées de Kiev. Rappelons que la coalition du Leopard est à A ces réserves, s'ajoute évidemment l'imbroglio logistique représenté par le soutien de ces chars en carburant, pièces détachées et munitions. Comme l'a souligné hier le Secrétaire Général de l'Otan, ces dernières représentent une des vulnérabilités les plus importantes pour les engins transférés ainsi qu'un coût estimé à plus de 40 milliards d'euros pour les 300 chars réclamés par le Président ukrainien, tirant chacun 60 obus par jour, dont le coût unitaire serait de 10.000 euros. Ces chiffres qui restent évidemment sujet à débat, permettent cependant d'estimer l'importance des sommes engagées par les pays soutenant l'Ukraine et de confirmer la nature "industrielle" de cette guerre selon les termes d'O.Kempf. L'intervention de Jens Stoltenberg rappellent également les limites du soutien occidental à Kiev, qui dépasse les capacités de l'Alliance et pose la vraie question de sa pérennité.

Ces différentes nouvelles démontrent qu'au-delà de l'engouement médiatique suscité par les différentes annonces des contributeurs à la coalition du Leopard, ces initiatives doivent être considérées avec lucidité et pragmatisme, pour en mesurer la portée exacte ainsi que les risques. Le transfert "clés en main" de chars à une armée étrangère en guerre en dehors de tout contrat commercial, qui constitue une première dans l'histoire militaire pourrait se révéler à terme plus lourd que prévu par les experts "es geste fort" pour lesquels la beauté du geste devait suffire à gommer les éventuelles difficultés logistiques et techniques. Il est indispensable d'attendre l'engagement des chars occidentaux pour tirer les premiers enseignements des initiatives occidentales sur le plan tactique et technique, qui pourraient nous réserver quelques surprises.