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lundi 5 juin 2023

LE SOUTIEN DES M1A1 AMERICAINS EN QUESTION

Alors que la formation des militaires ukrainiens sur le char M1 a débuté depuis quelques jours sur les camps de Grafenwoehr et d'Hohenfels, on en sait désormais un peu plus sur le transfert de ces engins. L'Ukraine qui souhaitait recevoir au plus vite le volume d'un bataillon soit 31 chars, a accepté le transfert de chars M1 au standard A1 pour ne pas avoir à attendre le début de l'année prochaine pour bénéficier d'une déclinaison plus récente basée sur la version A2. Les chars concernés devraient être déployés en Ukraine à l'automne après une formation que l'armée américaine a calibré à 12 semaines, et devraient être au standard M1A1 SA (Situation Awareness). Ces engins intègrent le système de commandement et d'information FBCB2 (Force XXI Battle Command Brigade and Below) ainsi qu'un viseur thermique pour la mitrailleuse de 12,7mm servie par le chargeur. Le M1A1 SA qui devrait être retiré du service actif au sein de l'armée américaine en 2025 équipe également l'Australie, le Maroc ou l'Iraq.

Ces chars seront rétrofités par GDLS (General Dynamics Land System) et livrés dans une configuration appelée "zero-hour conditions" supposée mettre les engins dans un état neuf. En dépit de cette quasi reconstruction, les chars destinés à l'Ukraine ne bénéficieront pas du blindage à l'uranium appauvri que les autorités américaines ont refusé l'exportation. Si les performances du char américain ne sont pas remises en cause, les conditions de son soutien commencent à être régulièrement évoquées. Ainsi on a appris que sur les 400 militaires ukrainiens actuellement en formation en Allemagne, 200 devraient composer 50 équipages, tandis que les 200 autres se forment à au maintien en condition de l'engin. La formation d'équipages supplémentaires traduit probablement la volonté de Washington de transférer d'autres chars dans un avenir plus ou moins proche, mais aussi le besoin de l'armée ukrainienne de disposer d'un nombre conséquent d'équipages pour tirer le meilleur parti du char américain. Jugé trop cher, trop complexe et présentant des difficultés de formation par l'administration américaine, le char américain inquiète également certains médias ukrainiens en raison de sa consommation élevée de carburant et des difficultés engendrées par son maintien en condition. Le Général (2S) Hertling, ancien commandant de la 1ère Division blindée "Old Ironsides", vétéran des opérations Desert Storm et Iraqi Freedom, rappelle qu'au sein de son unité, l'élément le plus important était le bataillon de soutien sans lequel tous ces super chars à 5 millions de dollars étaient incapables de combattre, faute de carburant, de munitions et de pièces de rechange. Selon lui, l'armée ukrainienne affiche des lacunes dans le domaine dans la gestion des chaines d'approvisionnement. L'officier cite en exemple, l'impérieuse nécessité de nettoyer les filtres à air moteur (une turbine Honeywell AGT 1500) toutes les 12 heures en respectant des procédures strictes, sous peine de colmatage. A ces exigences, s'ajoute le risque de voir un équipage endommager le char en effectuant une opération inadaptée. La complexité du groupe motopropulseur ainsi que la présence de nombreux composants électroniques confèrent à l'Abrams une fragilité qui inquiète plusieurs responsables militaires américains et ukrainiens. Cette situation aggravée par l'âge des engins concernés confirme le bien fondé de céder à l'Ukraine des M1 au standard A1 SA, moins complexe et moins "pointus" que les versions plus récentes. 

L'armée ukrainienne confrontée depuis plusieurs mois aux difficultés liées à la mise en oeuvre et au soutien d'une véritable mosaïque d'engins d'origine et de nature diverses, doit désormais de préparer à intégrer un char complexe et très exigeant. Dans ces conditions, le transfert de M1 ressemble véritablement à une opération politique dont l'annonce a permis au Chancelier Scholtz de lancer la "coalition du Leopard" en autorisant la réexportation du char allemand. 

2 commentaires:

  1. Trop fragile le M1A1 ?...
    Le MCO, la formation des équipages doit être conséquents et la chaîne logistique monstrueuse. Sortir de la culture des "T-64, 70, 80 et 84" doit être un choc.

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  2. Quatrième caractéristique commune aux chars, et aux véhicules blindés de combat en général :
    La fiabilité et la facilité d'entretien (MCO !), et sa proportion de disponibilité effective en opération.

    Ce qui renvoie au concept de char (lourd) "employable" (d'un certain Chassillian ; autrefois...), d'un juste niveau technique, du moment...

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