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vendredi 26 septembre 2025

UN CHOIX QUI INTERPELLE !

La récente livraison d'un système Proteus au 35ème Régiment d'Artillerie Parachutiste soulève quelques interrogations sur le choix du porteur mais aussi du système d'armes choisi pour ce segment. Ces questionnements interviennent à l'heure où les incursions de drones inconnus se multiplient dans plusieurs pays et que les armées européennes renforcent la protection de leurs engins, l'armée de terre semble une nouvelle fois céder aux sirènes de l'ultra léger non protégé, mais projetable sur des théâtres lointains. il ne s'agit pas de favoriser l'adoption d'un porteur chenillé, mais de s'étonner sur un choix à rebours des exigences actuelles, dans le domaine de la survivabilité et de multiplication des porteurs dédiés chacun à un armement unique. 

Le choix d'un simple camion dépourvu de toute protection dans le cadre du programme PAMELA (Plate Forme d'Adaptation Mistral Équipée, Légère, Aérotransportable) ne peut manquer de susciter des interrogations. Le niveau symbolique de la protection offerte par le fils (ou petit fils) du vénérable TRM2000, le Vampire ou V3P (Véhicule Porteur Polyvalent Pamela) de Scania s'inscrit en effet à rebours des orientations actuelles de nombreuses armées. Ce choix revient exposer le servant et le système d'armes au moindre projectile, éclat  fragment de métal, drone ou autre munition téléopérée parcourant le champ de bataille. En dehors d'une esthétique discutable, le choix rapide du Vampire  par le biais d'une procédure d'achat UGAP illustre l'urgence revêtue par cette acquisition, pour laquelle aucun autre engin français ou étranger n'a été envisagé. Ce choix conduit l'armée de terre à priver ces engins d'une protection devenue aujourd'hui indispensable comme le montrent les conflits en cours. Dans ces conditions, on peut donc s'interroger sur un choix, qui aurait pu s'orienter vers le Serval ou le VAB Mk3. Le choix du Serval pour ces systèmes aurait permis de créer un parc homogène au sein des brigades concernées, aux côtés des différents engins en service dont les 12 exemplaires prévus devant être équipés de missiles Mistral. Le VAB Mk3, développé par Arquus à partir d'un engin connu et fiable aurait également permis d'envisager l'intégration des différents armements, missiles et canon sur une plateforme unique. Le gabarit et / ou les limitations du Vampire interdisent probablement un tel montage. Un tel choix, Serval ou VAB Mk3 aurait permis d'améliorer la survivabilité du système et de son équipage. Dans les brigades blindées, le VBCI aurait pu constituer la base d'un système sol-air plus lourd, voir d'intégrer une tourelle Rapid Fire. 

Le Rapid Fire sur châssis 8x8 (Photo KNDS)

Le système Proteus dont le Standard 1 est en cours de livraison est basé sur le canon de 20mm F2 déjà monté sur les VAB T20-13 utilisé dans les années 1990. Même si comparaison n'est pas raison, on constate que de nombreuses armées ont choisi de regrouper sur une plateforme unique leurs armements de défense sol-air, en faisant cohabiter canon et missiles sur un même équipement. Ces derniers sont le plus souvent en nombre pour permettre l'interception de cibles multiples, aidés le par un radar également inclus dans le système. Le tourelle RIwP (Reconfigurable Integrated-weapons Platform) de MOOG choisie par le Royaume-Uni, constitue un des exemples les plus aboutis de ce type de système. Plus prés de nous de nous la tourelle Skyranger 30 de Rheinmetall, ou encore le système polonais Pilica réalisent cette intégration, comprenant en outre des moyens électro-optiques d'acquisition, de suivi et un radar. Avec ces nouvelles livraisons, la France devrait disposer de porteurs armés du système Proteus, de porteurs Mistral et dans le futur un Vampire embarquant un radar Giraffe 1X, soit trois véhicules distincts quand des industriels réalisent la fusion de ces équipements sur un moyen unique. 

Tourelle RIwP de MOOG (Photo MOOG)

On devrait retrouver ces véhicules dans nos régiments d'artillerie, à raison d'une section par régiment, le Régiment sol-air de l'armée de terre, le 54ème Régiment d'Artillerie devrait quant à lui être équipés de deux sections. Si le choix du Vampire et l'armement retenue constituent une solution intermédiaire permettant d'attendre la livraisons des Serval prévue à la fin de la décennie, on s'interroge sur la pertinence de développer un nouveau porteur, créant de facto un énième micro-parc disséminé dans les forces et partagé avec les forces spéciales au sein desquelles le véhicule de Scania en version VRP (Véhicule Ravitaillement dans la Profondeur) a remplacé le légendaire VLRA TPK 6.40 au sein du 4ème RHFS (Régiment Hélicoptères des Forces Spéciales). 

Le VRP de Scania

Au final, une acquisition qui interroge tant sur le choix d'un porteur dépourvu de toute protection, que sur le choix d'un armement unique. La physionomie générale de l'engin et sa vulnérabilité semblent plutôt le destiner à des "aventures" lointaines qu'à l'accompagnement et à la protection d'entités tactiques interarmes engagées dans un combat de haute intensité. Un choix atypique en décalage avec les exigences actuelles, comme un symbole de la perte de vitesse des matériels français sur les marché export.

Le V3P en version C20 Proteus (Phot Milinfo.org)

Le V3P PAMELA en version PAMELA

12 commentaires:

  1. Oui, mais avec quel argent ?

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    1. Avec celui qui aurait pu être économisé par cette acquisition !

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  2. Nous sommes face à un système intérimaire dans l'attente des Serval qui finiront par les remplacer à partir de 2028 et avant 2035. Ce n'est pas un système qui va équiper nos armées pour les 40 ans à venir.
    Le changement de plateforme est nécessaire en raison de l'abandon du TRM2000 qui devient difficile à soutenir.
    Il est nécessaire de donner aux utilisateurs des plateformes sur lesquelles ils pourront s'entraîner pour faciliter ensuite la transition vers le Serval.

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    1. En espérant que nous n'en n'ayons pas besoin pendant la transition. Quand a garder ces véhicules, j'ai du mal à imaginer que nous nous en séparions en 2028 2030

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    2. Je pense que l'AT a raison ici. C'est même trop lourd!!

      En Ukraine on observe que les 2 belligérents envoient leurs drones par des chemins sans cesse nouveaux et sur de nouvelles cibles.

      Or des cibles pour un drone a 50ke il y en a des milliers, la défence de point stratégique ne peut pas fonctionner, il faut de la defence mobile.

      Les véhicules d'interceptions parcourent donc au pied lever 100km pour tenter de trouver un point d'interception.

      Il faut donc rouler rapidement jusqu'au point de passage probable et etre immédiatement employable avec des dégats collateraux limité.

      Ces vehicules auront effectivement une utilité limité a moins de 20km du front mais dans la profondeur, c'est pas idiot.

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  3. Ce choix dicté par l'urgence démontre avant tout les lacunes majeures de la défense LAD au sein de l 'AT. Il témoigne en filigrane de l'absence totale d'anticipation de nos décideurs. "La fameuse guerre de retard" semble toujours d'actualité. L'urgence ne semble pas ouvrir d'autres options. En revanche, le nombre de Serval LAD commandés, l'absence d'accompagnement LAD de nos LECLERC est beaucoup plus problématique, (si ce n'est condamnable).La protection de nos bases aéronautique et navales (Toulon en particulier compte tenu de son positionnement géographique) devrait être également un sujet urgent de préoccupation .

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  4. Désolé pour les fautes d'orthographe et de conjugaison, de ce commentaire écrit à la volée.

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  5. Il est vrai que ça ressemble à une manœuvre d'urgence qui trahit un manque criant de moyens ou d'anticipation (ou les deux). Et je ne comprends pas pourquoi personne n'a retenu l'idée d'acheter le Sherpa Mistral, déjà disponible (exporté) et basé sur une plateforme éprouvée. Ce serait logique, mais ce mot n'est pas connu de la DGA. Bref encore un micro parc de plus. Pour le coup, rien de réglé pour avoir des moyens d'accompagnement de chars. Et dire que les blindés avaient demandé le Mistral pour les protéger des hélicoptères.

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  6. en Ukraine ce type de défense aérienne semble fonctionner et cela permet à notre armée d'avoir une fonction anti aérienne anti drone opérationnelle maintenant, il est a noter que l'armée de terre semble vouloir transposer les logiciels conçus pour le 20mm sur les tourelles de 12.7 si cela fonctionne touts véhicule blindées équipés d'un tourelleau Hornet pourrais faire de l'anti drone anti aérien et créer une bulle de protection autour d'eux.
    les camions Scania sont made in France
    penandreff

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  7. En partant de zéro, il fallait bien une solution LAD quasi immédiate. Difficile d'imaginer aujourd'hui un déploiement quelconque et où que ce soit sans LAD, sauf à prendre d'énormes risques...

    La solution immédiate pas chère est donc naturellement bancale en attendant les Serval dédiés (solution qui semble bonne, mais rien d'exceptionnel non plus, et en quantité trop homéopathique).

    En revanche, ces matériels resteront en service 25 ans c'est certain, ma foi, ce sera toujours utile dans la profondeur pour de la défense de points où les véhicules LAD ne sont pas la cible prioritaire contrairement aux premières lignes.

    En revanche y'a un truc que je ne pige pas: Pourquoi personne ne planche sur l'option LAD des centaines de tourelleaux que l'on possède/va posséder sur les Griffon, Serval, bientôt Leclerc et autres matériels où ils sont prévus. Ca ferait des paquets de LAD, et il me semble tout à fait possible d'y coller des radars. Ce ne serait peut-être pas de la LAD optimale (encore que, avec une munition optimisée), mais ça ferait assurément une sacrée densité.

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  8. Je trouve certains ci dessus bien sévères : Au contraire nous sommes dans la ligne droite de notre politique (? !!) d'échantillonnage, de bricolage, micros parcs et autres, et surtout de très grands n'importe quoi de ces vingt-cinq dernières années.

    Et d'autant que l'on est bien également dans la ligne de notre segment choisi léger et tout roues de ces dernières décennies, "on garde le cap, et on tient bon la barre"......
    Avec cette si belle production encore, indigne même des équipements de la seconde guerre mondiale ("Une guerre de retard", si seulement. C'est plutôt trois ou quatre à l'heure actuelle et au stade où en est la maladie...).
    Surtout absolument non protégés, je crois que certains y tiennent particulièrement. ...

    Enfin, on aura quand même réussit à mettre quelques manpad sur véhicule, c'est déjà pas si mal, vu notre état. Et même quelques équivalents de lance grenades également : 26 !!!
    Et ces noms : "Vampire"... !! Sans doute par ce qu'il suce le sang de ses malheureux occupants : Deux gars tranquillement assis à l'arrière de leur camion, encore ?

    Et évidemment "tout ça" (...) dans la parfaite urgence, si ce n'est la panique habituelle, comme depuis vingt ans également (!...) (On se rappelle de celle, la panique totale, pour l'achat (Hors de prix évidemment dans ces conditions.) de quelques tourelleaux téléopérés de mitrailleuse pour nos VAB, après Uzbin ; alors que le besoin était plus que parfaitement connu depuis au moins les années 90 et nos opérations dans les Balkans également. Cf l'armement partiel des Griffon par exemple encore aujourd'hui ("Faut faire des économies"...).).

    C'est vrai quand on compare avec les équipements qui sont en train en ce moment même d'être installés, partout ailleurs, cela fait encore plus mal, pour notre pauvre armée de terre et plus encore ses soldats et les personnels volontaires qui les servent.
    Quels bricolages quand même !

    Aucun système canon à tirs rapides (Skyranger ou autres.) en attendant, pourtant indispensables (Cinq à six cent chez nos voisins directs.) même pour faire de la lutte anti drone au moins un peu sérieusement !! ? !
    (Encore une fois, "anecdotiquement", pas forcément la meilleure option, des missiles antiaériens à 400 000 € pièce pour faire la chasse aux drones à dix balles comme dirait l'autre.)

    On les aime tellement aussi, nos micros parcs couteux (De démonstration commerciale, ratée souvent en plus du fait des types d'armements trop décalés. Merci, ou que fait, la DGA, aussi... ?????) au fond.
    En effet comme l'ont déjà fait remarquer certains, c'est pas comme si on avait pas du nouvel argent tout frais, à gaspiller (Des systèmes intérimaires pour quelques années seulement, bien sûr... Encore une "riche" idée !! Et encore, "intérimaires" de quoi ?), encore plus.

    Bref ce n'est pas les années trente qui se profilent à nouveau devant, mais bien celles d'un nouvel aout 1914...

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    1. "Et d'autant que l'on est bien également dans la ligne de notre segment choisi léger et tout roues"
      Partout ailleurs les systèmes antidrones sont sur chenilles?

      "Avec cette si belle production encore"
      Il ne s'agit pas d'une production mais d'une adaptation d'équipements qu'on a sous la main pour amener une réponse rapide là ou des commandes d'équipements neufs mettent 2 ou 3 ans avant d'entrer en service.

      "Enfin, on aura quand même réussit à mettre quelques manpad sur véhicule"
      Cela fait des dizaines d'années que le système PAMELA (Plate forme d’Adaptation Mistral Equipée, Légère, Aérotransportable) existe. Vous qui êtes un expert venez de le découvrir uniquement lorsqu'on change le camion porteur?
      Ce système n'a rien de nouveau, il n'est pas non plus une réponse contre les drones, c'est la continuité d'un système présent dont le porteur (TRM2000) est au bout du rouleau et rarement disponible. Ceci en attendant les Serval Mistral.

      "la panique totale, pour l'achat (Hors de prix évidemment dans ces conditions.) de quelques tourelleaux téléopérés de mitrailleuse pour nos VAB, après Uzbin"
      Le VAB TOP a été commandé avant Uzbin
      https://www.opex360.com/2008/05/19/des-vab-plus-protecteurs/
      N'inventez donc pas des histoires dont vous ne maitrisez pas le récit.



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