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mardi 27 octobre 2020

UN CANDIDAT SERIEUX

La récente annonce de Rheinmetall à l'occasion du salon AUSA 2020, est à ce jour l'unique candidature officielle pour le programme Optionally Manned Fighting Vehicle (OMFV) en vue du remplacement du Bradley. Cette nouvelle candidature qui intervient après une première tentative, l'arrêt du programme et sa relance par l'armée américaine, peut permettre au Lynx KF41 de s'imposer dans cette compétition. Le nouveau cahier des charges édicté par l'administration américaine, l'environnement international, ses qualités techniques et son potentiel d'évolution pourraient contribuer à faire du lynx KF41 le prochain Véhicule de Combat d’Infanterie de l'armée américaine.

Les raisons qui avaient conduit à l'éviction du Lynx lors de son premier engagement dans le programme OMFV sont pratiquement identiques à celles qui aujourd'hui lui valent d'être en parfaite adéquation avec les besoins exprimés par l'armée américaine lors de la relance du programme, abandonnant au passage ses chimères d'aérotransportabilité et de légèreté. En relançant le programme OMFV l'armée américaine a placé en tête de ses exigences la survivabilité, la mobilité, l'évolutivité et la létalité. Au cours du Salon AUSA 2018, où il fut officiellement présenté comme candidat,le Lynx KF41 avait marqué les esprits en étant le plus lourd des candidats potentiels, son poids de 55 tonnes avait estompé ses autres qualités sacrifiées sur l'autel des exigences de la projection et de l'aérotransport qui imposaient l'embarquement de deux OMFV à bord d'un C-17. Toutes ces exigences ainsi qu'un planning irréalisable conduisirent à l'arrêt du programme et son redémarrage en avril dernier. Les priorités fixées par le nouvel appel d'offres et l'environnement général donne au Lynx KF41 de sérieuses chances de s'imposer sur ce marché tant en termes de spécifications que d'exigences calendaires, l'engin de RheinMetall étant le seul candidat déclaré et surtout le seul engin existant aujourd'hui. 

Le second grief qui fut retenu en son temps contre le Lynx fut qu'il n'était pas "proven" et restait donc un engin inconnu offrant peu de références à l'exception des arguments développés par son constructeur. Cet engin présentait un risque pour l'armée américaine qui avait fixé les premières livraisons de son nouveau VCI à 2026. Les années qui se sont écoulées ont permis à RheinMetall d'obtenir un premier contrat en Hongrie pour la livraison de 218 engins en neuf versions pour un montant de 2.4 milliards de dollars. Au delà de ce premier succès le Lynx KF41 est également engagé dans deux appels d'offres. Le premier en Tchéquie pour le remplacement des BVP2, pour lequel il est opposé à l'Ascod II de General Dynamics Land Systems  et au CV9030 de BAE Systems, deux sociétés que Rheinmetall devrait trouver sur sa route dans le programme OMFV. Le second en Australie avec la Phase 3 du Programme Land 400 australien dans lequel le Lynx KF41 est opposé au AS-21 Redback d'Hanwha. Ces deux appels d'offres permettent de mettre en compétition les meilleurs VCI chenillés occidentaux. Quelque soit le résultat, ces deux appels d'offres devraient susciter un intérêt important outre atlantique, au vu des sociétés engagées et des processus d'évaluation et de sélection. Quelque soit leur résultat, ces compétitions permettront d'avoir une idée précise des qualités et des défauts des engins engagés et de leurs capacités à répondre aux besoins d'une armée moderne.  

Depuis 2018, Rheinmetall a retravaillé "sa copie" pour offrir un engin plus adapté aux exigences américaines, particulièrement dans le domaine de sa capacité d'évolution. Pour s'imposer dans le projet OMFV, la société allemande met en avant des caractéristiques techniques pouvant être adaptées à la mission. Ainsi le poids de l'engin peut évoluer de 34 tonnes dans une configuration maintien de la paix, jusqu'à 50 tonnes dans une configuration lourde qui reste compatible avec les moyens de franchissement actuellement en service, de classe MLC 80T (Military Load Classification 80 tonnes pour les véhicules chenillés). La Hongrie a vraisemblablement tenu compte de cet argument dans son choix du Lynx. Autre domaine d'évolution, la tourelle qui avec son architecture ouverte permet d'intégrer des éléments différents nécessaires à une mission. Pour le remplacement du Bradley, la tourelle Lance 2.0 permet l'emport d'un lanceur rétractable pour des missiles antichar de type Spike LR2 ou d'un UAV. Aujourd'hui armé d'un canon Wotan de 35mm on pourrait envisager une version plus lourde avec un armement de 50mm basé sur le canon XM 913 de Northrop Grumman. La mobilité est également évolutive avec une gamme de moteurs proposés allant de 730 à 1150cv. La commande hongroise qui prévoit neuf versions de l'engin illustre également la capacité d'évolution du Lynx KF41. 

En dépit de la création d'America RheinMetall Systems L.L.C, le Lynx KF41 n'est pas un produit américain, à ce titre il pourrait souffrir de ses origines et se trouver pénalisé pour le programme OMFV. Dans ce domaine la victoire du Boxer dans la phase 2 du programme Land 400 démontre la capacité de la société allemande à satisfaire des exigences nationales en matière de transfert de technologies ainsi que de sa capacité à produire hors d'Allemagne avec la construction en Australie de 42 tourelles destinées à la Hongrie. Dans ce pays, une joint venture est également en cours de constitution, elle permettra de fabriquer les Lynx en Hongrie, à la fois pour les besoins nationaux mais aussi pour ceux de futurs clients. Par ailleurs, Rheinmetall est connu aux États-Unis pour son savoir faire dans le domaine des blindés et de leur équipement, en fournissant le canon lisse M246 de 120mm qui équipe le M1 Abrams, ainsi que les munitions utilisées par ce même char. Enfin, Rheinmetall s'est associé avec deux poids lourds de l'industrie d'armement américaine que sont Raytheon Technologies et Textron. Cette alliance peut être déterminante dans le choix des décideurs américains, car ces deux sociétés disposent des compétences et des équipements pour la réalisation de transferts de technologies et la fabrication "Made in USA" des futurs OMFVs.

Rheinmetall est aujourd'hui le seul candidat déclaré pour le programme OMFV avec un engin qui compte parmi les meilleurs véhicules de sa catégorie. Au regard de ses qualités, de ses performances et de sa reconnaissance par plusieurs armées, le Lynx KF41 dispose de tous les arguments pour devenir le futur Véhicule de Combat d'Infanterie de l'armée américaine. Celle-ci comme de nombreuses armées souhaite disposer avec type d'engin d'une infanterie blindée mécanisée, puissante, protégée et mobile, clé du succès des futures opérations aéroterrestres comme le montrent les conflits actuels.

2 commentaires:

  1. "les besoins exprimés par l'armée américaine lors de la relance du programme, abandonnant au passage ses chimères d'aérotransportabilité et de" (fausse) "légèreté. En relançant le programme OMFV l'armée américaine a placé en tête de ses exigences la survivabilité, la mobilité, l'évolutivité et la létalité." :
    On ne peut que noter, une fois encore, le décalage, complet, le gouffre même (il est là le prochain véritable gap technique pour nos armées, la prochaine "surprise stratégique", comme ils disent), avec l'armée de terre française, ou ce qu'il en reste malheureusement.
    Une armée à la dérive, restée bloquée dans le temps, et dans des concepts de la fin des années 90 (abandonnés par les américains en 2003, au contact des réalité réelles du terrain (en Irak)).

    Pour le reste pas de surprise, les américains sont passé du Puma, allemand, précédemment envisagé, au Lynx, allemand.
    Soit deux VCI de haute intensité pour un même pays et au gout du jour des grandes évolutions actuelles en matière de combat des grande armées modernes d’aujourd’hui, sauf une (deux avec les belges !) évidemment. Des véritables innovations qui leur permettent d'exporter, au passage !!

    Le Puma ayant déjà un blindage modulable, avec une version de base (de 30 tonnes) et des blindages, de hauts niveaux, rapportables. Portant l'ensemble à 43 tonnes, et déjà à un niveau de blindage équivalent aux anciens chars moyens de précédence génération (on en est très, très, très loin, avec notre VBCI, de 32 tonnes).
    De même que l'installation d'un canon de 50 mm était déjà prévu de facto et anticipée sur ce dernier.
    Ronin.

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    1. Bonjour, merci de votre commentaire ! Je dois avouer que même si je le savais, mes "recherches " pour ce blog me permettent de mesurer le gouffre technologique et surtout doctrinal qui sépare notre armée des autres armées occidentales ! Mais quand certains nous expliquent que le combattant du futur sera en jean baskets ca ne motive pas pour l'utilisation de blindés !

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