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dimanche 27 décembre 2020

LE LECLERC N'IRA PAS AU MALI, UN POINT C'EST TOUT !

Le blog "Opex 360" indique dans un post rédigé hier que l’État-Major des Armées écarte désormais l'éventualité de déployer des chars Leclerc au Sahel. Sans revenir sur les arguments développés dans un précédent article, blablachars ne peut que s'interroger sur les raisons qui peuvent motiver un état-major à balayer d'un simple revers de main la simple étude du déploiement de char Leclerc dans la région sahélo-saharienne. Doit-on y voir simplement la énième expression d'un  dogmatisme antichar désormais avéré, ou l'habile dissimulation de l'inavouable incapacité de notre armée à réaliser une telle opération ?

 

Il y a presque un an, à l'issue du sommet de Pau réunissant les chefs d'états du G5 Sahel autour du Président de la République, ce dernier avait annoncé l'envoi de deux cents soldats supplémentaires pour renforcer les capacités de combat de l'opération Barkhane. Auparavant et à plusieurs reprises le Général Bosser, alors chef d'état major de l'armée de terre (CEMAT) avait envisagé l'emploi de chars Leclerc dans la bande sahélo-saharienne, en association avec le Tigre pour une efficacité que l'on pouvait alors imaginer optimale. Un an après la déclaration de Pau et les interrogations de l'ancien CEMAT, le sous-chef opérations de l’État-major des Armées a définitivement fermé la porte au renforcement de l'opération Barkhane par le déploiement de chars Leclerc, privant ainsi l'opération Barkhane d'un des moyens les plus efficaces et les plus performants en service dans nos armées.

Cette décision est certainement motivée par l'opposition quasi génétique d'une partie de nos décideurs à l'emploi de chenilles en dehors du périmètre des camps de Champagne et dans le cadre d'un déploiement (minimal) otanien sur les terres baltes. Cette même opposition avait déjà conduit les planificateurs à exclure les chars AMX30B² du dispositif initial de l'opération Daguet, il y a trente ans. pour eux il était impossible que des chars lourds puissent être intégrés à une force expéditionnaire mobile et projetable, dont le concept d'emploi fut validé au cours de l'exercice "Moineau Hardi" quelques années auparavant

Au-delà de cette simple et constante opposition, les véritables raisons de cette décision de non projection sont peut être à chercher du côté financier et logistique, la décision d'envoi d'un volume significatif (S/GTIA?) de chars Leclerc au Sahel achèverait sans doute une composante déjà largement diminuée. En raison de moyens extrêmement comptés, l'envoi de chars au Sahel priverait les équipages de la presque totalité des capacités et moyens d'entrainement. Dans ces conditions, le déploiement de Leclerc à Barkhane nous ramènerait à l'année 1991 avec les AMX 10RC restés en métropole dépouillés de la plupart de leurs composants pour soutenir les engins engagés dans les sables saoudiens. Avec un volume d'heures d'entrainement déjà réduit d'un tiers en 2019 et des stocks de pièces de rechange quasi inexistants, la projection de Leclerc par notre pauvre armée pourrait être le synonyme de la mort lente et prochaine de ce qui reste un des meilleurs systèmes d'armes blindés au monde. Ce qui reste de la capacité blindée lourde de l'armée de terre peut donc s'estimer heureuse d'une telle décision qui la garde en état de survie pour encore quelques années en lui conservant des moyens de plus en plus réduits et comptés. A cette indigence, il convient de rajouter le démarrage dans les prochains mois de la revalorisation (minimaliste) du char qui ne manquera pas d'impacter la disponibilité des chars et donc l'entrainement des équipages. Tous ces facteurs contribuent à l’appauvrissement de notre composante blindée lourde et à la disparition de ses capacités de projection au sein de nos dispositifs. Impossibilité politique, exclusion doctrinale et indigence de moyens sont la triste réalité de notre composante blindée, alors que la plupart des pays sont sur une trajectoire diamétralement opposée.

Pour justifier le non déploiement de chars et fermer définitivement la porte à toute suggestion de cet ordre, l'officier général met en avant les orientations prises par l'opération Barkhane en précisant que "...nous avons engagé les armées maliennes dans la voie de la réactivité, de la mobilité et de la légèreté en formant les ULRI, qui sont équipées de pickups et de motos." L'allégement recommandé à l'armée malienne devrait-il nous empêcher de déployer des moyens plus puissants que ceux actuellement déployés ? Les AMX 10RC (vaillants et sur blindés quadragénaires) et les VBCI sont donc jugés suffisants," l’utilisation éventuelle du char Leclerc n’est donc pas étudiée." Même si la logique qui prévaut dans ce raisonnement reste un peu difficile à percevoir, ces propos n'augurent rien de bon quant à la volonté et la capacité de la France de déployer des chars lourds sur une théâtre d'opérations extérieures. Même si ces déclarations ne constituent pas une nouveauté, le caractère péremptoire et définitif du propos laisse tout de même songeur et sans illusion quant au crédit accordé par les états-majors au déploiement de moyens lourds dans une opération.

Durant les dernières décennies c'est à "contrecœur" que la France a déployé des chars lourds en opération. Plus qu'un simple engin, le char de bataille est l'expression terrestre la plus puissante de la détermination d'un pays à s'engager dans une opération et à imposer sa volonté. A la différence de la France, de nombreux pays ont compris l'intérêt de posséder des chars modernes dotés d'un environnement interarmes adapté, capables de s'engager face à une grande variété d'adversaires.

11 commentaires:

  1. Pour faire un exercice de niveau division, l'armée de terre prévoit d'être prête en 2023.

    Trop long certainement vu la vision du CEMAT et les avertissements du CEMA...

    Les militaires français participeront à un grnd exercice à l’occasion de l’exercice de niveau division « Warfighter 21-4 » prévu pour avril 2021.

    Les 1ère et 3e divisions de l’armée de Terre s’y entraîneront aux côtés de la 1ère division blindée américaine et de la 3e division britannique, le tout subordonné au 3e corps de l’US Army:
    https://forcesoperations.com/un-exercice-franco-britannico-americain-de-niveau-division-au-printemps-2021/


    L'exercice français de niveau division autour de la haute intensité s’appellera "Exercice Orion", prévu en 2023 dans le Nord-Est de la France. Un autre est prévu en 2025.

    Avec un déploiement massif en réel de matériels majeurs et de structures de commandement sous la houlette de la 3è Division, permettant de remettre la brigade au cœur du déploiement et la division comme intégrateur des effets interarmes-interarmées... et de faire effort sur les soutiens.
    http://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2020/12/14/location-de-tentes-21705.html

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    1. Tant mieux pour les hommes qui pourront s'entrainer dans ce contexte même si les matériels ne sont clairement pas conçus pour la haute intensité !

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    2. Quelques réflexions :
      En effet, le Leclerc est un équipement typiquement conçu pour la haute intensité.
      L'engager pour de la contre insurrection ne parait donc pas la meilleur façon de l'utiliser, ni de le mettre en valeur.
      Son maintien en conditions opérationnelles est excessivement couteux. C'est un des principaux défaut du Leclerc, du à sa sophistication. De mémoire les 13 Leclerc engagés au Liban avaient coutés quelques 60 millions par an, et cannibalisé l'ensemble des quelques trois cent Leclerc que nous avions encore à l'époque.
      A partir de là, engager de tels moyens, comme en fait également partie le Tigre, sur un théâtre comme le sahel et ce type d'opération, est un non sens stratégique. Le coûts de ces matériels et de ces opération font ainsi que les adversaires ont stratégiquement en partie gagné cette guerre, en nous faisant mobiliser d'énormes moyens, pour peu de résultats (la situation sécuritaire, malgré les communiqués de victoire prochaine de l'Elysée, ne faisant que se détériorer au fil des années.).
      Par contre, en effet, les chars sont, et restent indispensables pour toute opération de haute comme de moyenne intensité par le niveau de protection qu'ils apportent en particulier.

      Ronin.

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    3. Par contre pour aller botter le cul à daesh par exemple, il aurait été parfait.

      De même, l'envoi d'une vraie division aurait grandement honoré la France. Une vraie division de trente mille hommes par exemple, avec ce qui va avec, et si tenté que l'on est encore de vraies division, qui sont plus des coquilles vides, sans les appuis et sans la logistique et tous les moyens qui vont normalement avec ce genre de grande unité constituée.
      Surtout après qu'ils soient venu assassiner plus de trois cent citoyens français, dans nos propres rues : Du jamais vu historiquement, et plus encore en tant que non réponse à tel événement.
      On a été incapable en réalité d'envoyer plus que 5 canons et une demi douzaine d'avions, et de réagir réellement à la hauteur de l'évènement et de cette attaque historique (si d'autres n'y avaient pas été, à notre place, on y serait encore, et sans doute avec encore plus de morts français :
      Voilà en vraie réalité, dans la vraie vie, à part faire de la contre insurrection à n'en plus finir, où nos armées, de représentation, en sont aujourd'hui rendues.

      Ronin.

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    4. Avec toujours notre invité surprise:
      http://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2020/12/09/covid-19-21695.html

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    5. Ça sent bon les années 80-90!
      "La 4e DAM intègre ensuite la force d'action rapide (FAR), l'expérimentation menée de septembre 1984 (exercice Damoclès) à juin 1985 (exercice Fartel) ayant montré la pertinence d'un tel concept d'aéromobilité pour un emploi outre-mer.

      En effet, la loi n° 83-606 du 8 juillet 1983 porte approbation de la programmation militaire 1984-1988 et met sur pied cette grande force expéditionnaire capable d'agir en Centre-Europe ou dans le reste du monde dans des conflits dits intermédiaire, souhait du ministre de la Défense Charles Hernu afin de compenser l'infériorité numérique des forces de l'OTAN face aux forces soviétiques.

      Avec un état-major basé à Nancy, et forte de plus de 6.500 hommes, la 4ème DAM compte 40% des hélicoptères de l'armée de Terre (environ 210 machines). 

      L'idée était de pouvoir se projeter à plus de 350 km de ses bases en moins de 12 heures pour porter le combat anti-char et obtenir un effet tactique d'importance (avec une capacité antichar instantanée théorique de plus de 400 missiles, face à une division en mouvement). Cela en faisait un outil décisif dans les plans de jalonnement (embuscades et harcèlements) des forces du Pacte de Varsovie (face aux éléments de tête, les Groupements de manœuvre opératifs (GMO) soviétiques) avant le Rhin, et donc dans la mise en place en sûreté de la 1ère Armée française.

      Les évolutions de format ne voient pourtant pas l'apparition de nouveaux modèles d’hélicoptères, ce sont simplement des versions modernisées des Gazelle (canons ou Hot) et Puma qui sont mises en service, une critique récurrente de l’époque, comme le rappelle un rapport sénatorial sur la manœuvre de déshabiller Paul pour habiller Pierre: "Chaque régiment d'hélicoptère de combat de la FAR représente un potentiel de 60 hélicoptères : 10 hélicoptère d'appui protection, 30 hélicoptères antichar et 20 hélicoptères de manœuvre.

      Un tel système de regroupement représente l'inconvénient majeur de diminuer les capacités aéromobiles des corps d'armée qui ne disposeront plus désormais que d'un régiment d'hélicoptères de combat au lieu de 2 soit 60 appareils dont 30 seulement à vocation antichar et 10 d'appui protection".

      Tiré de cet article, qui a une très bonne suite sur des opérations plus récentes:
      http://mars-attaque.blogspot.com/2020/05/operations-motos-dhier-1er-ri-12.html

      À ne pas confondre 4e DAM qui a été dissoute et 4ème BAC créée en 2016:
      https://www.forcesoperations.com/4e-bac-nous-restons-engages-et-prets/

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    6. Il y eut aussi en septembre 1987, la manœuvre franco-allemande Moineau Hardi (Kecker Spatz) en Bavière, compagnie en tête du régiment avec la présence du président François Mitterand et du chancelier Helmut Kohl.

      Toute la 4ème DAM se déplaça de 300 km depuis ses bases, et frappa ensuite, détruisant, selon l'arbitrage, une centaine de blindés.

      Il y eut une suite avec la manœuvre Damoclès en 1991, emportant la 4e DAM loin de ses bases dans le Poitou.

      Cela se voit que les généraux ont près de 40 ans de service...

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  2. Barkhane va maigrir, tout simplement:
    http://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2020/12/26/sahel-le-retrait-d-une-partie-des-troupes-francaises-est-des-21736.html

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  3. pour faire simple la haut on aime pas la chenille,il y a aussi en exemple le batchar en 95 deux escadrons pro de Mourmelon et Verdun, pendant plusieurs mois sur canjuers, presque toute la dotation de 105 de l'abc tiré sur le parcours lagne, un très haut niveau avait été atteint, plus les AUF1 et le REP pour former la FRR.
    la reconnaissance faite par les CDU sur Sarajevo
    départ de la FRR la Bosnie...... sauf pour le bataillon d'amx30b2 brennus la champagne

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  4. Pour donner quelques primes OPEX à la cavalerie lourde, il y aura l'europe de l'est:
    http://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2021/02/15/lynx-estonie-21890.html

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  5. Vu le sérieux de ce qu'il se passe là-bas, cela vaut mieux...
    http://www.opex360.com/2021/04/14/il-est-impossible-de-savoir-ce-que-sont-devenus-les-16-000-soldats-formes-par-la-mission-europeenne-eutm-mali/

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