Le salon IDEF 2021 qui s'est tenu cette semaine à Istanbul était évidemment marqué par une forte présence des industriels turcs qui ont profité de l'occasion pour présenter leurs productions. Parmi celles-ci figuraient des engins déjà en service et pour certains exportés, tandis que d'autres semblaient encore en développement. La multiplicité des projets et engins présentés au cours de ce salon, pose la question de la cohabitation de ces entreprises ainsi que d'une éventuelle rationalisation du secteur. La consultation des différents médias ainsi que le concours précieux d'un visiteur (qu'il soit ici vivement remercié) de ce salon permet à Blablachars de vous proposer une revue d'effectifs des principaux engins blindés sans autre prétention que de mieux vous faire connaitre les productions et les enjeux de ce secteur, dont le principal reste l'indépendance et l'autonomie, pour limiter les effets des restrictions imposées à Ankara par de nombreux pays.
A tout seigneur, tout honneur c'est avec l'Altay que démarre notre "visite" du salon avec la présentation par BMC des deux versions de l'engin. Le premier de ces deux engins est l'Altay hybride constitué d'un châssis de Leopard 2 et de la tourelle originelle du char. Le second char visible sur le salon est la version initiale de l'engin tel que le montraient les premières images 3D diffusées en aout 2010. Les onze années écoulées depuis ces premières images ont été marquées par l'apparition du premier prototype et le transfert du projet à la firme BMC, après le développement initial réalisé par Otokar. Aujourd'hui le retard pris par le programme empêche de prévoir avec certitude la date de mise en service du char dans l'armée turque ainsi que sa possible exportation. L'annulation ou la suspension d'un certain nombre de coopérations techniques (moteur, boite,...) peuvent en partie expliquer le retard pris par le développement du char qui pourrait également être lié au changement d'industriel en cours de développement. |
Altay Hybride (Poste de pilotage à droite)
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Altay en version originale (Poste de pilotage au centre)
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En attendant l'arrivée encore très incertaine de ce char, l'armée turque modernise les chars en service comme le M60 TM doté de plusieurs systèmes développés par Aselsan dont le système de protection active Pulat. Ce dernier est une version turque du système Zaslon développé par la firme ukrainienne Microtek qui équipe les M60A3 turcs.
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M-60 TM doté du système PULAT
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M-60 A3 Sabra turcs
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Du côté des VCI chenillés, la firme Otokar présentait le Tulpar dans différentes versions permettant de souligner la modularité de plateforme capable d'accueillir une large gamme d'armement allant de la tourelle 3105 de John Cockerill Defense à la tourelle maison Mizrak-30, armée d'un canon de 30mm et pouvant recevoir des missiles antichars UMTAS. On retrouvait également la tourelle belge sur le châssis d'un autre VCI chenillé, le Kaplan produit par FNSS dont l'Indonésie devrait recevoir 18 exemplaires d'ici la fin de l'année 2021, avant la livraison en 2022 de 52 exemplaires suivis en 2023 de 19 chars et de 17 en 2024, pour une commande totale de 106 chars légers Kaplan (Harimau). La présence de cette tourelle sur ces deux engins confirme la place occupée par le manufacturier belge sur le segment des armes de gros calibre, qui constitue son coeur de métier historique et certainement un de ces domaines d'excellence. La recherche par de nombreuses armées de chars légers / moyens pourrait ouvrir des perspectives à John Cockerill Defense et encourager le développement de nouvelles versions de ces tourelles intégrant les dernières évolutions techniques.
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Otokar TULPAR avec tourelle MIZRAK-30
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Otokar TULPAR avec tourelle 3105 John Cockerill Defense
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FNSS KAPLAN avec tourelle 3105 de John Cockerill Defense
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Ces engins tous deux basés sur un châssis de VCI offrent à des clients potentiels une opportunité de s'équiper d'engins différents capables de remplir un large éventail de missions, issus d'une plateforme unique offrant une communalité intéressante en termes de soutien et de formation.
Le secteur des VCI à roues illustrait également la pluralité des offres proposées par les industriels turcs dans ce domaine avec 3 engins différents, l'Arma 8x8 d'Otokar, le Pars 8x8 de FNSS et le ZMA Altüg de BMC. Bien que différents dans leur conception, ces trois VCI ont en commun d'être tous trois concurrents pour l'appel d'offres du gouvernement pour la fourniture d'un VCI à l'armée turque, et d'être équipés de la même tourelle, à savoir la tourelle Kohran produite par Aselsan. Déjà aperçue sur le Tulpar et l'Altüg, cette dernière est armée d'un canon de 35mm et embarque plusieurs systèmes comme l'Akkor pour la protection active, le Yamgoz pour la surveillance périphérique ou le détecteur d'alerte laser Lias.
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ZMA ALTUG de BMC
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FNSS PARS 8X8
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OTOKAR ARMA 8x8
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Cette édition a également permis de voir l'Akrep II dans sa dernière version. Doté d'un moteur diesel, cette nouvelle déclinaison de l'engin produit par Otokar est également armée d'une tourelle de gros calibre de John Cockerill Defense, la CSE LP 90. L'ensemble assez compact offre une alternative intéressante aux engins de reconnaissance dotés de canons de moyen calibre et n'est pas sans rappeler dans son esprit l'ERC 90 Sagaie.
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Otokar AKREP II
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OTOKAR AKREP II
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Les engins téléopérés n'étaient pas oubliés avec la présentation par la firme Katmerciler de son drone terrestre armé d'une RWS Sarp Dual d'Aselsan, qui devrait entrer en service dans l'armée turque avant la fin de l'année 2021.
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UGV de KATMERCILER avec RWS SARP DUAL D'ASELSAN
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L'autre représentant de ce type d'engin était le démonstrateur Shadow Rider présenté par FNSS. Conçu à partir d'un M113 l'engin armé d'un canon de 25mm est équipé d'un module de pilotage autonome également développé par FNSS permettant au Shadow Rider d'agir selon différents modes (patrouille, recherche ou retour à la base). Dans le domaine des UGVs, en Turquie comme dans de nombreux pays, les industriels démontrent leurs capacités à développer de nouveaux engins dont la mise en service et l'utilisation nécessitent un effort doctrinal important, pour permettre une utilisation cohérente et efficace de ces plateformes. Ne pas conduire cette réflexion reviendrait à ne pas exploiter de façon optimale les capacités techniques de ces engins qui repoussent chaque jour les limites de leur utilisation.
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La base du Shadow Rider
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Le Shadow Rider de FNSS
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Si ce tour d'horizon des principaux engins blindés présentés au salon IDEF 21 illustre les capacités de l'industrie de défense turque dans ce domaine, il pose également plusieurs questions. Parmi ces interrogations, il serait intéressant de connaitre les raisons du transfert du projet Altay d'Otokar à BMC ou la présence d'une seule tourelle sur les trois projets concurrents pour le futur VCI de l'armée turque. Ces interrogations ne doivent pas masquer le dynamisme du secteur turc de l'armement terrestre et l'agressivité commerciale des firmes pour conquérir de nouveaux marchés sur tous les continents. Contraintes de rechercher des fournisseurs locaux en raison des restrictions et limitations imposées par plusieurs états, les firmes turques sont en train de constituer une BITD particulièrement active dont le retour complet sur le marché accompagné d'une reprise des coopérations constituerait alors une concurrence sévère pour bon nombre d'entreprises du secteur.
Une base industrielle et technologique de défense terrestre turque en effet particulièrement vivante, et de plus en plus complète et diversifiée et même innovante, et évidemment pragmatique (une armée de terre qui comme la plupart naturellement s'adapte aux vraies réalités d'aujourd'hui, type Haut-Karabagh, par exemple.) ...
RépondreSupprimerCa se passe de tout commentaire, et de toute comparaison.
"il serait intéressant de connaitre les raisons du transfert du projet Altay d'Otokar à BMC" : Otokar ne fabrique pas de moteurs ce qui n'est pas le cas de BMC.
RépondreSupprimera part BMC les autres fabricant Turques dépendent de l'Allemagne (Mercedes, MTU, Renk) ou de l'oncle SAM (Cumins Allison)
L'indépendance de la Turquie est toute relative....