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samedi 2 novembre 2024

UNE FOIS N'EST PAS COUTUME !

Une fois n'est pas coutume, Blablachars a eu envie d'évoquer le nouvel ennemi du char et autres blindés, le drone, ou plutôt les drones. C'est après la consultation de nombreuses sources d'informations et documents traitant du sujet que le blog complètement blindé a pu dégager quelques idées relatives aux différents types de drones et à leur emploi. Au-delà de ces considérations, il est apparu important de souligner que le drone est certes une arme redoutable mais aussi un outil de commandement dont l'utilisation a déjà commencé à modifier profondément le combat. Cette utilisation requiert bien évidemment un environnement adapté, tant en termes de sécurité que de communication, conditions essentielles à une utilisation optimale de ces nouveaux engins. 

Au début était le drone d'observation ! Tel était l'usage initial des drones destinés à observer en toute discrétion le dispositif ennemi, soit en vue d'une action future, soit pour exercer une surveillance permanente. Dans le premier cas, le drone permet de dresser une cartographie précise des positions, voire de la nature des éléments adverses, permettant au chef interarmes d'ajuster son dispositif et peut être de se procurer des opportunités supplémentaires.  Dans le second cas, le drone peut, grâce à son autonomie, assurer une couverture quasi permanente du dispositif ami permettant de se prémunir de toute surprise tactique. Dans leur offensive vers Koursk lancée en août dernier, les forces armées ukrainiennes ont eu recours aux drones d'observation dans la phase de préparation, mais aussi durant l'action avec une véritable couverture drone des éléments de manœuvre.  


C'est à partir de ces engins que les drones de combat ont été développés pour permettre aux plus bas échelons tactiques de disposer de munitions de précision, et ce pour un coût minimal. Alors que les projectiles "intelligents" affichent des couts d en plus en élevés, (plus de 100 000 dollars pour un obus de 155mm Excalibur) le drone armé d'une roquette antichar ou d'une "simple" charge creuse permet de disposer d'une capacité de destruction à un prix considérablement moindre. Outre cet avantage financier, le drone a procuré aux plus bas échelons tactiques une capacité de destruction jusque là réservée aux échelons supérieurs disposant des moyens de mise en œuvre, comme les unités d'artillerie, habituellement employées au niveau brigade ou division. Pour arriver à cette vulgarisation les concepteurs de drones d'attaque ont développé leurs engins à partir de produits immédiatement disponibles et surtout bon marché, habituellement destinés à une utilisation grand public. Aujourd'hui encore, la majorité des drones armés utilisés dans le conflit ukrainien est constituée par des engins simples, capables de supporter les adaptations les plus simples comme les plus complexes. Cette utilisation de drone bon marché permet de garantir un approvisionnement relativement régulier et surtout un coût d'acquisition considérablement réduit par rapport à un produit spécialement développé et produit en nombre limité.

Qu'il soit d'observation ou armé, l'usage d'un drone requiert des capacités de communication particulièrement fiables et puissantes. Les forces ukrainiennes qui utilisent ces engins de façon intensive, s'appuie pour cela sur le réseau de transmissions satellitaire Starlink mis gracieusement à leur disposition par Elon Musk. Cette opportunité permet aux FAU d'utiliser les drones de façon quasi permanente, dans des missions normalement dévolues à des acteurs humains, comme l'observation et le réglage des tirs d'artillerie ou encore la conduite des missions de reconnaissance. Sur le théâtre ukrainien, lorsqu'elles sont confiées à des entités humaines, ces missions sont exécutées à une distance maximale de 500m, en raison de la présence de nombreuses mines et obstacles. Au-delà de cette élongation, le recours aux drones est quasi systématique, permettant d'obtenir en toute sécurité des renseignements aussi complets et utiles. 

Lorsque les blindés sont engagés en offensive, le drone devient l'outil de commandement quasi idéal du commandant d'unité qui peut réajuster son dispositif, élargir l'observation ou repositionner des éléments. La reconnaissance d'itinéraires de progression, de positions de coup d'arrêt est confiée aux drones qui remplace alors les éléments d'observation humains. Cette possibilité de démultiplication des capacités d'observation au profit des éléments blindés est déjà perçue par quelques armées, qui ont décidé d'embraquer un de ces engins à bord de leurs chars. On peut citer l'exemple italien avec le mini drone italien Horus mis en œuvre à partir de l'Ariete et du Freccia, celui du Merkava, ou plus récemment l'embarquement d'un drone à rotors contrarotatifs sur le VT-4 A1 chinois. 

 

Au sein d'un dispositif défensif, le drone peut acquérir des objectifs dans la profondeur ou à portée des chars pour permettre à ces derniers de limiter au strict minimum leur temps d'exposition, en leur donnant la possibilité de préparer leur tir dans une position abritée avant sa réalisation. Le drone d'observation est également utile pour permettre au chef interarmes de déceler d'éventuels espaces lacunaires dans son dispositif pouvant être exploités par l'ennemi et de combler rapidement ces intervalles. Les capacités d'observation des drones ont donné au début du conflit aux forces ukrainiennes un réel avantage sur les forces russes, qui ont depuis rattrapé leur retard dans le domaine. Ces observations ont permis d'exploiter au mieux les erreurs tactiques russes ainsi que les faiblesses des dispositifs logistiques russes.  

Le drone, que certains ont vu comme le tueur de char ultime reste une arme majeure dont la généralisation sur le champ de bataille a considérablement modifié les conditions d'emploi des matériels déployés. Cependant le conflit ukrainien doit être regardé avec beaucoup de circonspection, compte tenu de l'utilisation quasi systématique du réseau Starlink mais aussi des réseaux classiques par le biais de messageries (Signal) ou de VPN sécurisés et cryptés. Le recours à des plateformes low cost permet de développer des engins peu onéreux à l'achat mais aussi en termes de maintien en condition. Les opérateurs effectuant eux-mêmes le plus souvent les opérations, parfois à l'aide de "tutos" disponibles sur You Tube et avec des pièces commandées directement auprès de fournisseurs civils. Le meilleur exemple de cette adaptation reste celui de drones chinois Combo produits par la firme DIJ auxquels sont accrochés des grenades et des munitions antichars. Les images fournies par un drone d'observation permettent d'observer en temps réel les résultats de l'attaque. Dans le domaine de la fabrication bon marché, le recours à l'impression 3D pourrait encore modifier la donne en termes de coût, de disponibilité et de maintien en condition. Enfin comme tous les armements, le drone qu'il soit d'observation ou armé, nécessite une formation du personnel chargé de leur mise en œuvre. En l'absence de données formelles, on estime à une cinquantaine d'heures le temps nécessaire pour former et entraîner les équipages avant que ceux-ci ne soient pleinement opérationnels. 


Le char de son côté, reste une victime de choix pour ces nouveaux engins face auxquels les parades techniques commencent à apparaître, comme les systèmes de protection active tridimensionnels, ou l'installation d'armes de défense adaptées comme le canon de 30x113mm monté sur le Leclerc Evo. En complément de ces armements embarqués, la défense des unités doit être organisée pour permettre de détourner la menace des engins et de la détruire par des moyens adaptés. La lutte contre ces nouvelles armes et plus généralement la défense sol air est devenue une priorité pour de nombreuses forces armées qui ont choisi de monter les équipements et armements nécessaires sur des plateformes capables de suivre les engins à protéger, mais cela est une autre histoire.....

11 commentaires:

  1. Le réseau Starlink n'est pas à proprement parlé utilisé pour piloter les drones, c'est bien trop gros, lourd et chers pour des petits drones (compter au minimum un bon 3 kg de charge pour un système communication satellitaire). Starlink est utilisé pour transmettre les vidéos prises par les drones entre les opérateurs et les centres de commandement.
    Le problème de la protection des bindés contre les drones est moins le moyen de neutralisation que celui de la détection. Avoir un canon de 30 mm c'est bien mais si on est pas capable de détecter la menaces, cela ne sert pas à grand chose. De même, on peut avoir de raisonnables doutes quand à l'éfficacité des systèmes hard kill contre les drones. C'est un vrai défi pour les radars que de détecter ces petits engins, encore plus quand l'ensemble est en déplacement. Le taux de fausses alarmes risque d'être très élevé...

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  2. Au début était le drone d'observation, en conditions asymétriques ces toutes dernières décennies (Comme l'hélicoptère, "d'attaque"...).
    Important l'observation aérienne, pour tout commandant, des plus hauts aux plus petits échelons (Surtout dans le cas qui nous intéresse principalement ici : Le vrai usage nouveau des drones. (Au delà des fantasmes de certains ; de beaucoup même.).) ; mais ça on le sait, depuis l'invention des premières Montgolfières.

    On avait même développé à une certaine époque des drones rapides, supersoniques, destinés à faire de l'observation au dessus des lignes ennemies ; tout en ayant une bonne chance de survie (!!), grâce à leur vitesse, d'où difficulté à être intercepté (Ce qui n'est sans doute pas la qualité première des drones "bon marché" actuels.).
    Jusque là rien de très nouveau : Seule nouveauté réelle, le recours en masse à ces engins téléguidés bon marché.

    Leur emploi massif pourrait en effet sembler être un nouveau "game changer" (Le fameux, de tout "bon" "journaliste" "spécialiste" actuel !).
    Mais comme pour la mise en place initiale de nouveaux procédés, ne pas oublier qu'il y a toujours une petite période de latence avant que la ou les parades ne soient mises en place. Ici ne pas négliger, ou balayer d'un revers de mains (Comme savent si bien le faire certains, quand cela leur déplait.) le très grand retour de l'antiaérien (Comme celui de l'artillerie, du génie, des munitions, du nombre (Bigre !!!), etcetera.), sans rajouter les divers moyens de brouillage qui commencent seulement à être installés.

    Quel sera l'avenir du drone, fétu de paille d'une ou deux guerres ou nouveau équipement majeur des armées dans la durée, seul l'avenir nous le dira.
    (Evitons les conclusions hâtives comme pour les lance-roquettes antichar au début du conflit ukrainiens, grand nouveau destructeur définitif du char...).

    Probablement que certains emplois au niveau tactique notamment et jusqu'au plus bas échelons plus particulièrement, les drones MALE et HALE existent également depuis bien longtemps eux aussi, perdureront, comme un équipement de plus, parmi beaucoup d'autres.

    Par contre sur l'aspect strictement offensif, d'attaque offensive (Avec bombinettes et autres.) j'ai des doutes. Pas mal le coup de la bouteille en plastique "tueur de char" !! (Ou l'éternelle "réinvention" de l'usage du cocktail Molotov ("Tueur de char" lui aussi...) ? !!!...)

    Voir comment tout cela se comportera dans un environnement de haute intensité moderne à l'avenir ; voir même en face d'une simple tecno guérilla qui s'y sera adapté ; et qui aura même sut renverser ces nouveaux procédés, contre nous même (: !!! ...) ?

    Bref, plus de possibilités d'observation, on est d'accord là dessus (Surtout au niveau tactique "de contact" comme ils disent. Mais est ce que nos futurs adversaires se laisseront localiser aussi facilement ? !!), mais reste à voir comment cela va évoluer, face aux contre mesures qui seront inévitablement prises, et en terme de survivabilité réelle sur un champs de bataille moderne (S'il s'agit d'employer que des drones jetables évidemment, mais à quels coûts réels au final, surtout quand ils devront quand même être un peu "musclé" pour survivre le temps de leur mission d'observation, et de transmission ?).

    PS : Ce sont surtout les capacités du renseignement américain (Pas seulement "officiellement" Starling.) qui ont donné un réel avantage aux forces ukrainiennes (Quand elles avaient encore les moyens de contre attaquer...). Là aussi attention de ne pas nous faire prendre des vessies pour des lanternes, c'est à dire certains moyens mis volontairement en avant pour en dissimuler d'autres.

    En tous cas, une chose est sûr cependant, plus que jamais il va falloir sortir bien couvert (= Protection...) ...

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  3. Conclusion : Wait and see comme dirait l'autre (Ne nous emballons pas trop vite cependant, il ne devrait pas surtout servir de prétexte à négliger encore bien d'autres points et domaines. Malheureusement c'est bien se qui risque fortement d'arriver. Certains seraient même capables de nous ressortir "des chars, pour quoi faire"...).

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  4. Exclusive: Ukraine Secretly Uses US-Made V-BAT Drone to Locate Russian SA-11 Air Defense for HIMARS Strikes

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  5. Il y a ceci qui se lit bien sur le sujet:
    https://theatrum-belli.com/les-drones-dans-la-guerre-moderne-les-lecons-tirees-de-la-guerre-en-ukraine/

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    1. A condition de lire l'anglais ! ;)
      De manière assez soutenue en plus.
      Pour nous dire en substance encore "les drones changent tout, tout le visage de la guerre, ces formidables game changer" (Apparemment le docteur qui a écrit cette longue et belle "démonstration" (Avec les petits graphiques "scientifiques" qui vont bien !!) à l'air d'en être très convaincu.).

      On aimerait bien savoir ce que les militaires, plus encore ceux de terrain, voire même ceux en Ukraine, au delà de la propagande légitime (On nous a fait exactement le même coup pour le "grand public" au début de cette guerre, avec les lance-roquette cette fois là.), en pensent réellement.
      On ne le saura probablement qu'une fois cette guerre terminée et une fois que les vrais enseignements (Militaires et stratégiques et retours d'expérience pourront réellement être examinés (Au delà des effets médiatique à recherche de nouveautés, et des effets de mode...)... Une fois tout ça un peu décanté (Une fois que le brouillard de guerre aura un peu décanté.)...

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  6. Pour faire court :

    Terre, air, mer et espace par définition, le drone (terme générique) est là dans tous les domaines et perdurera encore longtemps sous différentes formes et usages. Tout comme le char (terme génériqu), il va évoluer, mais dans une temporalité différente.
    Les nombreux développements en cours et la débauche de moyens, pnus ou moins efficaces, pour les contrer témoignent du phénomène...

    Croire que le char est une cible privilégiée serait faire preuve d'un narcissisme partisan. Le champs de bataille est vaste et ses éléments nombreux. L'ensemble des drones permettent une meilleure connaissance et conscience de l'ennemi, tout en permettant des choix très ciblés des menaces et moyens mis en oeuvre pour les neutraliser, même dans la 3D. Là, personne n'est à l'abri, à moins de "disparaître" du décors.

    Il n'a pas pour fonction de supplanter les moyens "classiques" mais de s'y rajouter dans un emploi cohérent et collaboratif.
    Il faudra s'y faire, surtout pour les plus récalcitrants, et en user en ayant à l'esprit que les fondamentaux demeurent, comme le glaive et le bouclier, par exemple.

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    1. Vous en faite un de beau, vous, de "narcissisme partisan", comme vous dites...

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  7. En annexe et pour info :

    https://www.forcesoperations.com/voici-la-premiere-munition-teleoperee-souveraine-adoptee-par-les-armees-francaises/

    Une telle munition n'a pas une vocation spécifiquement anti-char de par sa charge militaire. Toutefois elle peut causer des dommages dans son environnement et plus dans certaines circonstances.

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    1. On préférerait surtout que le France (Eh oui, la Fraaance.) retrouve sa souveraineté, et son autonomie, en matière de munitions, "tout simplement".
      (Important l'autonomie stratégique dans toute vraie guerre ou dans tout vrai conflit (Y compris économique et industriel d'ailleurs.).)

      Au fait, pour revenir un peu les pieds sur terre encore, ça va nous couter encore combien votre nouveau bidule : Cent, deux cent, mille euros ; plus encore ?
      (Là par contre, il n'y a plus de "on a plus sous" (Pour produire en nombre ne serait ce un peu significatif vos bijoux (De technologie.), "évidemment".) ?

      Je croîs que c'est même exactement comme cela, les nouvelles armes miraculeuses, la course aux armements et à la techno à outrance surtout, que certains ont perdus leur guerre.
      Bon en même temps, quand on en est, "en même temps" justement à deux ou trois guerres de retard, on est plus à ça près, quelques centaines de millions ou milliards d'euros supplémentaires de gaspillés, est ce que cela compte vraiment encore !!

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