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vendredi 22 septembre 2023

LA DECISION POLONAISE VUE DU COTE DES BLINDES.

La décision polonaise de ne plus transférer d'armement et d'équipement à l'Ukraine a été abondamment commentée ces derniers jours. Blablachars, fidèle à son habitude s'est penché sur le côté blindé mécanisé du sujet  pour tenter de savoir ce que représentait l'aide polonaise dans ce domaine et quelles étaient les conséquences prévisibles de cette décision. Les estimations de ces livraisons permettent de disposer de chiffres fiables ainsi que d'un calendrier assez précis des transferts effectués et permettent de constater que les opérations relatives aux véhicules blindés étaient arrêtées depuis cet été. Parmi les matériels livrés par la Pologne, on peut citer le VCI (Véhicule de Combat d'Infanterie) BWP-1, le char T-72 et le PT-91 Twardy. Les données disponibles indiquent qu'avant de prendre cette décision, la Pologne avait fourni essentiellement les matériels d'origine soviétique que son armée utilisait depuis de longues années et pour lesquels les problèmes de maintien en condition étaient devenus très importants. 

Le premier de ces matériels, le BWP-1 faisait dès 2020 l'objet de recherches de Varsovie pour tenter de trouver des solutions de modernisation pour cet engin, jamais modifié depuis sa mise en service en 1973. La première solution retenue fut celle d'une accélération du programme Borsuk, tout en étudiant une possibilité de moderniser une partie des 1000 BWP-1 (version locale du BMP-1) détenus par l'armée polonaise. Ces pistes de modernisation fut explorée par plusieurs industriels parmi lesquels John Cockerill Defense qui exposait au salon MSPO 2021 un BWP-1 équipé de la tourelle 1030 de l'industriel liégeois. Le déclenchement de "l'opération militaire spéciale" russe en Ukraine, le 24 février 2023 modifia la position polonaise sur le sujet. Dès le mois d'avril, Varsovie commença à livrer à Kiev les premiers BWP-1, avec 40 exemplaires livrés entre avril et juillet 2022. Les livraisons de BWP-1 stoppées depuis avril dernier aurait permis de transférer un total de 142 engins, représentant le volume de 4 bataillons blindés. On retrouve la trace d'une partie de ces engins au sein de la 116ème Brigade mécanisée, d'autres sources ukrainiennes mentionnent l'entrainement de troupes du 8ème Bataillon d'assaut autonome appartenant à la 10ème Brigade d'assaut de montagne. 

Livraison des premiers BWP-1 en avril 2022 (Ukraine Weapons Tracker)

Le transfert des chars T-72 encore détenus par l'armée polonaise fut encore plus rapide puisque dès le mois de juin 2022, le président indiquait que le premier lot important de T-72 (probablement 60 chars) était déjà en Ukraine, alors  que les livraisons avaient débuté au mois d'avril. Tous modèles confondus, la Pologne aurait transféré vers l'Ukraine 240 chars comprenant des T-72M/M1 ainsi que des T-72M1R version modernisée des précédents. Ce volume représente environ 55% du parc de T-72 détenu par l'armée polonaise, 127 étant en condition opérationnelle tandis que 257 exemplaires étaient déjà stockés. Une partie des T-72 polonais aurait été affectée à la 118ème Brigade mécanisées et à la 22ème Brigade mécanisée.

Premières livraisons de T-72 à l'Ukraine (Ukraine Weapons Tracker)

La Pologne qui détenait 232 PT91 Twardy, version polonaise du T-72M1 en a livré 60 exemplaires à Kiev en avril dernier. Ces engins construits entre 1995 et 2002 incorporaient un certain nombre de modifications par rapport au char d'origine. Parmi ces dernières, l'ajout de plaques de blindage réactif ERAWA, d'une conduite de tir SKO-1M Drava associée à une caméra thermique. La moitié des 31 PT-91 transférés auraient été affectés à la 117ème Brigade mécanisée et à la 22ème Brigade mécanisée au sein de laquelle ils opéreraient aux côtés des T-72 polonais. Le premier PT-91 aurait été détruit en juillet dernier dans la région de Zaporijia, un second aurait également été détruit ces derniers jours. 

PT-91 Twardy livré à l'Ukraine.

Ce bilan montre que les livraisons polonaises à l'Ukraine ont essentiellement concernés des matériels déjà anciens auxquels se sont rajoutés 14 Leopard 2A4 dont les premiers exemplaires ont été remis à Kiev en février dernier, portant à 324 le nombre total de chars transférés à l'Ukraine par la Pologne. 

La décision polonaise pourrait priver les forces ukrainiennes de 60 PT-91 Twardy supplémentaires dont la livraison n'avait pas été confirmée, après que les 60 premiers chars de ce type soient arrivés en Ukraine. Dans le domaine des VCI, la livraison des 200 Rosomak commandés par Kiev et financés par l'Europe et les Etats-Unis reste en suspens. Cette commande ne représente pas un simple transfert de matériels vieillissants mais un contrat commercial en bonne et due forme, assorti des habituelles garanties de réalisation et de paiement. L'autre question posée par la décision polonaise concerne la pérennité des structures de soutien et de réparation déployées en Pologne et déjà objet d'un contentieux entre Berlin et Varsovie.

Comme on le constate, la décision de Varsovie  intervient après une longue série de livraisons de matériels vieillissants détenus par l'armée polonaise et pourrait avoir un impact relativement limité sur l'équipement des forces armées ukrainiennes qui ont déjà reçu depuis le début du conflit 595 chars fournis par les pays occidentaux et devrait en recevoir 235 autres, parmi lesquels au moins 145 Leopard 1A5 et 31 M1 Abrams. A ces chars en provenance des pays donateurs, il convient d'ajouter les 550 chars russes capturés par les forces ukrainiennes depuis le début du conflit. 

20 commentaires:

  1. Les Polo ont refilé leurs vieilles merdes et en échange l’UE (en clair FR et DE) a payé du matos US / KR dernier cri. Ils passent leur temps à cracher sur leurs financiers et maintenant trahissent l’UKR face à un ennemi existentiel parce qu'il y a 3 pèquenots qui râlent à propos de céréales. On a les dirigeants que l’on mérite

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    1. Les KRABs polonaises sont pas des veilles merdes aka AMX 10 et Leo 1

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    2. Frede6. En 39/40, la France n'a strictement rien fait pour son alliée polonaise! Par contre, après la défaite de la Pologne des dizaines de milliers de soldats polonais ont traversé toute l'Europe pour combattre en France sous commandement français... Et, à ce jour, en tant qu'alliée de l'Ukraine, la Pologne a été exemplaire! Elle le sera sans doute encore après les éléctions.

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    3. En 1939, au niveau terrestre l'armée française était très largement en mesure d'aider la Pologne et son armée, aujourd'hui ce serait l'inverse.

      Exemplaire, jusqu'à aujourd'hui.

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    1. Je ne suis pas d'accord avec cette analyse. Il est facile de se moquer des autres mais quel est notre aide?

      Objectivement, la Pologne (et les pays baltes) a aidé l'Ukraine du mieux qu'elle le pouvait.

      Si nous avions offert 60 de nos Leclerc que dirait le Blablachar Polonais? Que les français se sont débarassés de matériels vieillissants construit entre 1990 et 2008 (vs 1995 2002) difficilement maintenu et mal aimé? Le même discourt pénible est servit par la propagande russe vis à vis de nos AMX 10-rc.

      Je pense que les polonais limitent les dégats électoraux. Les agriculteurs sont peu satisfait de l'afflut de blé ukrainien a prix bradé (afflux forcé par le blocus russe).

      Donc le gouvernement donne le change, mais rien de profond la dedans. Derrière, le robinet ne va pas s'arreter. Les polonais savent le prix que paye les ukrainiens.

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    2. Mais je ne moque pas je reste factuel et ne porte aucun jugement de valeur. Mais force est de constater que ds le domaine des blindés les engins transférés ne sont pas de première jeunesse. Mais la Pologne n'est pas la seule à avoir agi ainsi.

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  3. J'aimerai savoir pourquoi les chars sont très peu employés actuellement par les ukrainiens. On voit beaucoup de transports de troupes. On nous explique que les chars seront employés une fois que les lignes de défenses russes seront percées. Ce n'est pas très flateur pour le char, celui-ci intervient une fois que le plus dur du travail est fait par l'infanterie ?! Donc pour percer des tranchées et des lignes de défense, il faut de l'infanterie ? Dans quels cas le char est-il employé ?
    Ce n'est pas une critique mais une demande d'éclaircissement.

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  4. Depuis le début de cette guerre votre question est au centre des débats, le char actuel est conçu pour le combat contre d'autres chars dans une guerre de mouvements faites par des unités mécanisées, mais cette guerre de mouvements n'a jamais eu lieu les colonnes Russes ont été bloquées par la défense territoriale ukrainienne, maintenant nous avons une guerre de positions ou les chars sont utilisés en appuis d'infanterie.
    Le char n'est peut-être pas le plus adapté dans ce rôle les VCI le sont ils?
    Bon weekend
    Penandreff

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    1. Les ukrainiens n'ont pas pu percer par manque de chars lourds, et tout ce qui va avec de même niveau.
      Au contraire, cette guerre en Ukraine à redémontrer à tous que les chars est un équipement terrestre offensif majeur, stratégique même.

      Enfin, à tous... Sauf chez nous.

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    2. Au contraire, cette guerre en Ukraine a redémontré à tous que les chars sont des équipements terrestres offensifs majeurs (Surtout si en nombre suffisant), stratégiques même.
      Au temps pour moi.

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    3. On nous explique que la plus part des chars ukrainiens ne sont pas utilisés. Ils sont en réserve et entreront en action une fois que les lignes de defense russes seront percées

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    4. Les chars servent précisément à percer les lignes.
      Encore faut-il surtout en avoir en nombre encore suffisant.

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  5. Bé oui (!!!!!), ils en ont profiter, pour se débarrasser de leurs anciens équipements soviétiques dont ils ne savaient plus que trop faire (Ils ont gardé les PT91 : Les petits filous ! ...).

    Cela, pour les remplacer par des équipements modernes actuels, américains, ou sud coréens (!), principalement, et autres débuts de développements de BITDT et d'équipements de conception polonaise (Pendant que d'autres n'en finissent de s'enkyster et de se rabougrir, cf la non revalorisation du Leclerc réaffirmée récemment et avec une grande constance... !!!)) Borsuk par exemple. Tiens ils ont parfaitement les moyens de développer seuls, leurs propre VCI national, eux.

    Comme les autres d'ailleurs, entre livraisons débarrassage de T72 T80 ("Fournis par les pays occidentaux"... Et un peu par les soviétiques quelque part !!) de diverses versions et de divers pays, et chars moyens anciens type Léopard1, et autres vieilleries ...
    Du coup après avoir donner généreusement toutes nos vielles antiquailleries, on arrive un peu au bout, de ce qu'on peut faire pour l'Ukraine et pour les ukrainiens.

    D'autant que les américains ne font plus tarder à siffler la fin de la partie ; ça à même déjà commencer (D'où la très récente nouvelle attitude et déclarations des polonais aussi.).

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    1. Why Not. Français d'origine polono-ukrainienne, je me permets de vous dire que vous ne comprenez pas grand-chose aux relations entre ces deux pays. Votre compréhension de l'attitude des USA où j'ai vécu de nombreuses années ne me semble pas meilleure. Il est encore trop tôt pour se prononcer. Donc, c'est possible, c'est peut-être probable, mais ce n'est pas certain!

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    2. On attend avec impatience vos "explications" ; qui ne viendront évidemment pas.
      Pure provocation et commentaire complètement superflu encore...

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  6. Humeur

    Il est toujours facile de commenter ou de lancer des affirmations gratuites, depuis son fauteuil, sur les actions des uns ou des autres. Les explosions, les destructions et la vision de chars décapsulés en direct, c'est bien à la TV...

    Aider sans se démunir, surtout en étant proche de la menace, est un exercice difficile pour sa propre défense.
    Faire une guerre par procuration de loin est aisée, même en mettant la main au portefeuilles.

    Sans vouloir porter un jugement sur l'attitude de la Pologne qui est une nation souveraine, le fait de se séparer des matériels de l'ex-URSS utilisables pour rentrer dans un standard moderne OTAN est une action intelligente et surtout profitable pour les fournisseurs. La Pologne a décidé d'assurer sa défense et elle a bien raison de défendre ses intérêts. Personne ne le fera à sa place, même avec l'appui des cris de vierges faussement effarouchées. Certes, la tendance est au nationalisme des politiques. Faut-il s'en étonner dans la periode ?
    Les règles et la "politique" de l'UE sont biens connues, si elles ne plaisent pas il faut les changer ou quitter l'UE...
    Quand à la Foir'Fouille, chacun y a contribué plus ou moins et les industriels en bénéficient grasse⁰ment actuellement...

    Une remarque sur l'univers parallèle des chars lourds : ce sont des moyens, comme d'autres pour un emploi aléatoire en fonction du terrain et de l'adversaire. Avec des "si", ce terrible conflit n'aurait même pas eu lieu.

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    1. Bé oui, si ils attendent après nous et après l'armée de terre française aux quarantièmes dessous, ils peuvent attendre longtemps.

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    2. Là vous enfoncez une porte blindée ouverte...

      Bé oui, nous ne sommes pas dimensionnés pour assumer, seul, un conflit de haute intensité classique dans la durée. C'est bien pourquoi nous sommes dans l'OTAN.

      Le vouloir demanderait un autre format avec d'autres moyens qui ne se limiteraient pas à quelques chars en plus. Politiques et citoyens français le veulent-ils ? Là j'ai un doute...

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    3. La réalité est bien plus grave : Même en coalition, nous ne sommes plus en mesure d'agir en quoi que ce soit, dans un cadre de haute intensité ; tous nos équipements terrestres sont exclusivement dirigés vers la très basse intensité.

      Pour le format, il ne faudrait pas grand chose de plus : Une redirection vers la haute intensité (Leclerc2, VCI, automoteurs blindés, antiaérien, etc.) surtout, et une meilleure organisation...

      Bien sûr que les français sont entièrement d'accord pour que leur pays redevienne une puissance militaire terrestre crédible * , et que l'on arrête pour cela à gaspiller (S'ils savaient réellement en plus...) et jeter leur argent par les fenêtres.

      * : C'est à dire, une dispositif militaire terrestre bien que limité qui soit capable de prendre sa part, rien que sa part, et d'agir, et de peser, dans "d'éventuels" futurs conflits dans un cadre de haute intensité, avec en particulier leurs soldats bien protéger. Ce qui est très loin d'être le cas aujourd'hui.
      Plus encore en coalition même, où actuellement on serait complètement ridicules (De façon bien pire qu'en 1991.) de part nos apports uniquement médians légers de garde des arrières des autres armées...

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