TROIS ENGINS POUR UNE MEME MISSION.

L'actualité blindée de ces derniers jours a mis en lumière trois engins développés par des pays différents pour remplir une même mission, la reconnaissance. Répondant à des philosophies et des besoins différents, ces trois engins devraient connaitre dans les mois qui viennent des destinées très différentes. Le premier est aujourd'hui au cœur d'une tourmente technico-financière, le second est en cours d'introduction dans une armée étrangère sans être en service dans celle de son pays d'origine et le dernier devrait être livré dans les mois qui viennent à l'armée de terre. Un rapide coup d'oeil sur l'Ajax, le Boxer CRV et le Jaguar, tous trois dédiés à la reconnaissance, permet de distinguer des similitudes et des différences que blablachars a tenté de résumer.

L'ARMEE AMERICAINE CHOISIT OSHKOSH POUR LES FUTURES TOURELLES DES STRYKERS

L’armée américaine a désigné hier la société qui fournira les tourelles des UpGunned Strykers. Ce marché d'une durée de 6 ans et d'une valeur totale de 942 millions de dollars, dont la remise des offres avait été retardée s'inscrit dans le programme MCWS (Medium Caliber Weapon System) a été attribué à la société américaine Oshkosh associée à la firme israélienne Rafael. Le premier lot de ce marché d'une valeur de 130 millions de dollars comprend la livraison d'ici décembre 2023 de 91 véhicules à la première des 6 SBCT (Stryker Brigade Combat Team) que l'armée américaine prévoit de doter de ces engins. La victoire d'Oshkosh associé à Rafael a privé Kongsberg d'un marché que beaucoup pensaient acquis et pour lequel la firme norvégienne proposait la tourelle RT40. Les projets des cinq autres sociétés ayant reçu des contrats d'étude non pas été retenus, il s'agissait GDLS, Leonardo DRS associé à MOOG, Raytheon, Pratt et Miller et EOS Systems. Le choix de la tourelle proposée par Oshkosh et Rafael a été certainement été guidé par la possibilité d'intégrer dans le futur un lanceur pour le missile antichar Spike ainsi que le système de protection active Trophy, ces deux équipements étant développés par la société israélienne et intégrés sur la tourelle Samson 30. 

L'exemple américain devrait inspirer l'armée de terre dont les Griffon seront armés d'une mitrailleuse de 12.7mm comme l'étaient les premiers Strykers. Les technologies développées ces dernières années permettent d'équiper des engins de vingt tonnes d'un armement performant.

VERS UN CENZUB MOINS "URBAIN" ?

Les opérations menées depuis plusieurs années dans des zones urbanisées ont favorisé l'émergence d'une réflexion de plusieurs pays sur le réalisme des centres d'entrainement en zone urbaine. La France possède avec le CENZUB (Centre d'Entrainement aux actions en Zone urbaine) une des infrastructures les plus performantes au monde dans le domaine. Elle ne cesse de l'améliorer par l'adjonction de nouvelles fonctionnalités, avec le rattachement de la future section Vulcain chargée de l'exploration et de l'expérimentation des systèmes automatisés ou la mise en service d'un Complexe d'Entrainement au Combat en Espace Clos (CECEC). Au moment où l'armée de terre s'est résolument engagée dans la préparation d'actions de haute intensité, elle pourrait envisager d'améliorer encore le réalisme de ses installations en les rendant moins "civilisées". Une prochaine évolution de ce centre pourrait être la mise en place d'un décor moins "accueillant" avec l'utilisation de plusieurs solutions. 

NOUVELLE RFI INDIENNE

L'Inde vient de publier une nouvelle RFI (Request For information) portant sur la fourniture de 1770 "futurs chars" dans le cadre du programme FRCV (Future Ready Combat Vehicle). Les exigences indiennes pour ce futur engin semblent très ambitieuses parmi lesquelles on peut retenir celles d'une plateforme intermédiaire servie par un équipage de 2 ou 3 hommes, armée d'une RWS capable de mettre en oeuvre des munitions rôdeuses et des moyens de guerre électronique. Il n'est pas certain que les technologies souhaitées aujourd'hui disponibles et matures. Cette RFI pourrait entrainer la fin de l'Arjun et de son programme de modernisation lancé récemment et dont le premier exemplaire a été remis à l'armée indienne en présence du Premier Ministre. Il est encore trop tôt pour connaitre la part qui pourrait être réservée aux industries indiennes, conformément à la politique d'auto suffisance mis en place par new Delhi il y a quelques temps. En revanche les autorités indiennes ont précisé que l'acquisition de ce futur engin dont la mise en service pourrait avoir lieu en 2030, se fera de manière progressive dans le cadre d'un partenariat stratégique. Si le T-14 avec un poids estimé de 55 tonnes venait à être considéré comme une plateforme intermédiaire, cette ambitieuse RFI indienne pourrait lui offrir un premier succès à l'exportation en lui ouvrant les portes du sous-continent indien. 

LE LUXEMBOURG VA REMPLACER SES HUMMER ET SES DINGO PAR UN VEHICULE UNIQUE

Après la Belgique avec le programme CaMo, c'est au tour du Luxembourg d'envisager l'acquisition de véhicules du programme Scorpion. Le Grand-Duché souhaite remplacer ses 48 Hummer et ses 42 Dingo par 80 "véhicules blindés de commandement, de liaison et de reconnaissance" ou CLRV (Command, Liaison and Reconnaissance Vehicle) ainsi que leur support logistique. Après avoir écarté l'hypothèse trop couteuse d'une revalorisation des Hummer et des Dingo, le Luxembourg a décidé d'acquérir un véhicule unique capable de remplacer ces deux engins dans leurs différentes missions. L'acquisition d'un équipement déjà en service au sein d'une grande armée voisine permettrait à l'armée luxembourgeoise de bénéficier d'un soutien adapté et d'approvisionnements sécurisés. C'est la NSPA (Nato Support and Purchase Agency) qui a été chargée du projet depuis l'étude préliminaire jusqu'à la réception des engins en passant par tous les aspects techniques et administratifs du futur marché (appel d'offres, réception des offres, contrôle qualité,...) Le budget maximal pour cette acquisition est estimé à 367 millions d'euros avec une mise en service prévue pour 2024/2025. L'interopérabilité recherchée avec les armées belges et françaises sera facilitée par l'équipement des futurs CLRV avec le système de communication et les radios du programme Scorpion. Le projet de création d'un bataillon belgo-luxembourgeois pourrait également favoriser les véhicules français, même si il ne faut pas oublier que les Belges ont choisi le JLTV d'Oshkosh Defense comme CLV (Command and Liaison Vehicle) dont les 440 exemplaires commandés seront également équipés du système Scorpion.

NOUVELLES DES ANTIPODES

C'est en Australie que l'actualité des salons d'armement nous emmène ces jours-ci et plus précisément à Brisbane, capitale de l'état du Queensland qui accueille jusqu'à demain le salon Land Forces Australia Indo Asia Pacific. Parmi les nombreux exposants, deux pavillons ont plus particulièrement retenu l'attention en raison de la présence sur ces stands des deux challengers du programme Land 400. Cette exposition médiatique permet aux deux sociétés de souligner l'implication des firmes locales dans la production des engins et de conclure des accords de coopération techniques.

L'autre actualité blindée, toujours dans le Queensland, est constituée par lé réception officielle du premier lot de Boxers CRV produits en série. Les 25 engins constituant ce lot sont les premiers Boxers livrés au standard de série, les précédents étaient des versions de présérie destinés à l'entrainement des premiers équipages. Cette réception a été officialisée au cours de la visite du Ministre australien de la Défense sur le site de Rheinmetall Australia à Redbank où les engins sont assemblés.

ET POURQUOI PAS LE HAWKEI ?

Depuis les attaques perpétrées par IEDs contre les véhicules de la Force Barkhane en décembre et janvier, de nombreuses réflexions sont menées au sein des différents organismes concernés pour tenter d'atténuer les effets de ces actions. Ces études portent essentiellement sur la réduction de l'exposition du VBL (Véhicule Blindé Léger) aux engins explosifs improvisés. Il s'agit de réduire sa vulnérabilité en réfléchissant à l'usage du véhicule dans les missions, mais aussi de proposer des solutions techniques permettant d'atténuer les effets des engins explosifs. En outre, et comme évoqué au cours de son audition à l'Assemblée Nationale par Mme Parly devant la Commission de Défense de l'Assemblée Nationale, la France est à la recherche de financements européens pour le développement du VBAE. Dans ces conditions et face à ce qui ressemble fortement à des difficultés financières, le recours à un achat sur étagère pourrait s'avérer judicieux et économiquement viable.